Dans le cadre de l’Année Internationale de la Planète Terre en 2008, placée sous l’égide de l’U.N.E.S.C.O. et de l’Union Internationale des Sciences Géologiques (U.I.S.G.), nombreux ont été les projets qui ont mis en lumière le patrimoine géologique mondial.
Cependant, intéressons-nous plus particulièrement à notre patrimoine géologique national, qui recèle des trésors de géodiversités, pour faire un point précis et détaillé des derniers stratotypes français encore valides.
Au nombre total de 46, il y a encore quelques années de cela, notre territoire ne compte plus que 19 stratotypes valides !
1. Qu’est-ce qu’un stratotype ?
Un stratotype est un affleurement désigné comme type d’un étage géologique (définition du dictionnaire de géologie de A. FOUCAULT et J-F RAOULT. Editions MASSON). En d’autres termes, il s’agit d’une période de référence qui sert en quelque sorte d’étalon.
Un étage en géologie est l’unité chronostratigraphique fondamentale, dont la valeur est universelle et qui est définie à partir d’une coupe-type que l’on nomme stratotype. Un stratotype matérialise donc un intervalle de temps précis et est choisi dans une série sédimentaire d’origine marine au contenu paléontologique spécifique.
2. Les stratotypes français valides
Dans l’histoire des sciences de la Terre, notre pays a créé de très nombreux stratotypes, attestant de la dimension historique et scientifique de la géologie française sur la scène internationale. Pourtant, aujourd'hui, seuls 19 d’entre eux demeurent encore d’actualité.
– Situation géographique des stratotypes français valides
Légende :
1. Givétien 2. Stéphanien
3. Autunien 4. Hettangien
5. Sinémurien 6. Toarcien
7. Bajocien 8. Berriasien
9. Barrémien 10. Aptien
11. Albien 12. Cénomanien
13. Turonien 14. Coniacien
15. Santonien 16. Campanien
17. Lutétien 18. Aquitanien
19. Burdigalien
La liste complète des stratotypes est réalisée, dans le tableau ci-dessous, accompagnée de la signification de chaque stratotype, du nom de l’auteur et de l’année de description.
L’ensemble des étages est classé dans l’ordre de l’échelle des temps géologiques, c'est-à-dire des stratotypes les plus anciens aux plus récents.
Débutons donc notre voyage dans le temps au Dévonien moyen, il y a 380 millions d’années avec le Givétien, pour le terminer au Miocène inférieur, il y a 16 millions d’années environ, à la fin du Burdigalien…
– Tableau des stratotypes valides
Ere |
Etages |
Origine et signification |
Auteurs et Années |
|
GIVETIEN |
de Givet (Ardennes) |
Gosselet, 1879 |
PALEO ZOÏQUE |
STEPHANIEN (étage le plus récent du Carbonifère) |
de Saint-Etienne |
Munier-Chalmas et De Lapparent, 1893 |
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AUTUNIEN (étage inférieur du Permien) |
de Autun (Saône-et-Loire) |
Bergeron, 1889 |
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HETTANGIEN (étage basal du Jurassique inférieur) |
de Hettange-Grande (Moselle) |
Renevier, 1864 |
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SINEMURIEN (étage du Jurassique inférieur) |
de Sémur-en-Auxois (Yonne) |
D’Orbigny, |
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TOARCIEN (étage du Jurassique inférieur) |
de Thouars (Deux-Sèvres) |
D’Orbigny, 1849 |
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BAJOCIEN (étage du Jurassique moyen) |
de Bayeux (Calvados) |
D’Orbigny, 1849 |
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BERRIASIEN (étage le plus ancien du Crétacé) |
de Berrias (Ardèche) |
Coquand, 1862 |
MESO ZOÏQUE |
BARREMIEN (étage du Crétacé inférieur) |
de Barrême |
Coquand, 1862 |
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APTIEN (étage du Crétacé inférieur) |
d’Apt (Vaucluse) |
D’Orbigny, 1840 |
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ALBIEN (étage le plus récent du Crétacé inférieur) |
de Alba, rivière l’Aube (Aube) |
D’Orbigny, 1842 |
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CENOMANIEN (étage le plus vieux du Crétacé supérieur) |
Nom latin de Le Mans (Sarthe) |
D’Orbigny, 1847 |
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TURONIEN (étage du Crétacé supérieur) |
de Turonia, nom latin de la Touraine (Indre-et-Loire) |
D’Orbigny, 1842 |
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CONIACIEN (étage du Crétacé supérieur) |
de Cognac (Charente) |
Coquand, 1857 |
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SANTONIEN (étage du Crétacé supérieur) |
de Saintes |
Coquand, 1857 |
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CAMPANIEN (étage du Crétacé supérieur) |
de la Champagne saintongeaise (Charente) |
Coquand, 1857 |
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LUTETIEN (étage de l’Eocène moyen) |
de Lutetia, nom latin de Paris |
De Lapparent, 1883 |
CENO ZOÏQUE |
AQUITANIEN (étage du Miocène inférieur) |
de l’Aquitaine (Gironde) |
Mayer-Eymar, 1858 |
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BURDIGALIEN (étage du Miocène inférieur) |
de Burdigala, nom romain de Bordeaux (Gironde) |
Depéret, 1892 |
Tous les stratotypes qui figurent dans le tableau ci-dessus sont donc les derniers « étalons » français encore en cours. Nous pouvons considérer que leur nombre est assez conséquent, preuve d’un rayonnement scientifique important au niveau mondial.
Toutefois, en tant qu’éléments naturels du patrimoine, il faut absolument les protéger dans leur intégralité et ne pas les voir disparaître au profit d’autres pays plus sensibilisés que la France.
Nous nous devons de conserver nos stratotypes pour leur aspect de rareté et d’unicité, pour leur intérêt pédagogique et leur contribution à la science pour les générations futures. A ce propos et à titre d’exemple, le stratotype de l’Aquitanien a fêté en novembre 2008, son 150ème anniversaire ! Preuve que notre société a la capacité à conserver et protéger son patrimoine naturel historique et à le mettre en valeur, puisque dans ce cas précis, il est depuis plus de vingt ans géré par la Réserve Naturelle Géologique de Saucats - La Brède.